dimanche 22 janvier 2017

Jean-Baptiste de Foucauld

Migrants : Osons la fraternité
La venue des migrants est plus qu’un défi, c’est une chance pour notre pays et pour l’Union européenne. Elle nous oblige à progresser, à résoudre toute une série de problèmes dans lesquels nous sommes empêtrés depuis de longues années. Elle constitue le choc tonique et nécessaire dont nous avons besoin pour sortir de notre torpeur, de notre léthargie, de notre pessimisme collectif, des souffrances qui en résultent, en mobilisant le meilleur de nous-mêmes, cet esprit de fraternité que notre République a placé au faîte de ses frontons mais n’a pas su cultiver. Il s’agit, et pour nous, et pour l’Europe, de s’ouvrir à un nouvel état du monde et à un nouvel état de nos sociétés, désormais plurielles, et s’enrichissant de nouvelles formes de solidarité. De sortir de cette crise par le haut, par le courage et l’élan, non par le repli, la résignation et le défaitisme.
Voilà l’offre politique nouvelle dont notre pays a besoin aujourd’hui. Il faut selon nous l’exprimer clairement et la mettre en oeuvre progressivement, en lien bien entendu avec nos capacités de mobilisation et d’accueil, sans maximalisme, mais avec exigence.
Nous proposons d’ouvrir clairement le débat et plus précisément :
- De poser de manière générale ce principe raisonné d’ouverture et d’accueil ;
- De faire appel délibérément aux facultés de solidarité existant sur le terrain et auprès des citoyens en faisant appel notamment aux maires et élus locaux, et en aidants les porteurs d’initiatives à s’organiser et à coopérer. Le mouvement doit être porté de manière participative par toute la société, pas seulement par l’Etat. Celui-ci doit susciter l’adhésion et entrainer plus qu’obliger ;
-De renforcer simultanément nos actions de lutte contre le chômage et l’exclusion, de se mettre tous ensemble autour de la table pour en faire une priorité vraiment partagée afin d’élargir l’accès à l’emploi ; ainsi la solidarité à l’égard des entrants s’étendra simultanément à celle que nous devons intensifier aussi vis-à-vis des personnes en difficulté dans notre société.
- D’appliquer et de concrétiser sans plus attendre cette attitude vis-à-vis de ceux qui fuient la Syrie. Nous avons avec ce pays et le Liban voisin des liens historiques et amicaux, donc des responsabilités particulières. Nous ne devons pas les esquiver. Un accueil ouvert, la reconnaissance de principe du droit d’asile et un permis de travail immédiat pour les syriens : nous pouvons le faire, nous aurions dû le faire, il y a urgence, c’est un minimum que nous devons nous imposer ! Nous verrons ensuite comment élargir cette nouvelle approche; cela nous amènera à réfléchir aux conditions de bonne intégration dans une société à la fois laïque et pluriculturelle ;
- De proposer à l’Union européenne d’inciter les Etats membres à adopter une attitude voisine, et d’aider concrètement les pays volontaires par un programme spécifique financé par l’emprunt. Dans les périodes de guerre, où apparaissent des besoins collectifs nouveaux non finançables par les moyens normaux, on déroge temporairement aux règles habituelles. Ce que montre la période récente, c’est que les guerres du pourtour méditerranéen nous concernent directement, l’espace-temps s’étant rétréci. Se sentir directement concerné est pour l’Union européenne un choix stratégique et géopolitique essentiel. C’est tout son modèle de société, son rôle d’acteur dans le monde qui se joue là ; 

- De proposer une conférence internationale sur les migrations : celles-ci ne concernent pas seulement l’Europe, mais l’ensemble des continents, dont chacun doit prendre sa part. Parmi les sujets à traiter, l’idée d’une taxe internationale sur les transactions financières, paradis fiscaux compris, pourrait être relancée, en vue de dégager des moyens de financements suffisants pour aider tant les pays de départs que les pays d’accueil.
 

Jean-Baptiste de Foucauld, coordinateur du Pacte civque (www.pacte-civique.org)