jeudi 26 janvier 2017

Marie Odile Dissert

Nous accueillons des exilés.
A Strasbourg.
A nos portes.
En bas de chez nous.
Ils arrivent, seuls, à deux, un qui parle, un qui traduit, en couple, en famille.
Regards inquiets, le doute qui ronge le visage, le corps tendu, voûté par l’épreuve. Que dire ? Par quoi commencer ?Que dire d’une vie perdue, d’une errance sans retour, d’une fuite vers nulle part ? que dire d’un rêve de paix ? d’une volonté de réparation, d’une résistance ? d’un sursaut de dignité ?
Par quoi commencer ? un acte de naissance ? une nationalité ? les discriminations ? les injustices ? les violences ? la misère ? la haine ? la peur ? l’espoir ?
Et qu’ai-je à répondre ? qu’ai-je à répondre à des hommes, des femmes des enfants pour qui vivre est juste vivre, survivre, attendre, résister, espérer ?
On me dit : « autorisation provisoire de séjour » : une vie provisoire.
On me dit : « obligation de quitter le territoire français » : pour aller où ?
On me dit : « interdiction de retour sur le territoire français » : « vous qui entrez, laissez toute espérance »
Migration
Immigration, exil, exode, bannissement, ostracisme, expatriation, expulsion.
La médiocrité administrative, avec son cortège de mesquineries, de peurs, de rejets.
Je sais ce que coûte l’immigration ici, en France, en Europe. Je sais que les calculs ne sont pas simples. Et je sais aussi que l’immigration nous rapporte, que nous en avons besoin, pour notre économie, pour notre rayonnement , et tout simplement pour notre humanité et notre intelligence.
Je suis française, européenne, je refuse de donner de nous cette image indigne à ceux qui croient-ou croyaient- que nous étions les enfants des Droits humains.
Marie Odile Dissert bénévole à la Cimade à Strasbourg.